"Nous allons annoncer demain que nous demandons un mandat au conseil pour la négociation du régime d'importation de la banane. Nous avons pris l'engagement de négocier à l'OMC un système de protection non plus contingentaire mais tarifaire, qui entrerait en vigueur à partir du 1er janvier 2006", a expliqué M. Lamy, au cours d'un entretien avec l'AFP. Au terme d'un contentieux perdu face aux Etats-Unis devant l'Organisation mondiale du commerce à la fin des années 90, l'Union européenne avait dû ajuster en 2000 son système d'importation, jugé discriminatoire à l'égard des producteurs de "banane dollar" (Amérique centrale). Et elle l'a de nouveau modifié au 1er mai dernier au moment de l'élargissement, pour y faire entrer les dix nouveaux pays membres.
Le régime contingentaire permet de protéger l'accès privilégié au marché européen pour les producteurs des pays ACP (Afrique, Caraïbes, Pacifique) et ceux de régions périphériques de l'Union comme les Canaries espagnoles ou la Martinique française. Le mandat de négociation voulu par la Commission fait que "le régime de croisière des importations après le 1er janvier 2006 sera une protection tarifaire conforme à la clause de la nation la plus favorisée, et des avantages spécifiques pour les pays ACP", a expliqué M. Lamy.
Ces pays "ont encore, je le crains pour un certain temps, un désavantage de compétitivité par rapport aux bananes d'Amérique centrale", a-t-il ajouté.\n La clause de la nation la plus favorisée, pilier du système commercial multilatéral, impose d'étendre à tous les pays membres de l'OMC les avantages consentis au pays le mieux traité. Pour le consommateur européen, qui paye actuellement ses bananes nettement plus cher que son homologue aux Etats-Unis, le passage à un régime tarifaire ne signifiera pas nécessairement une baisse des prix, a indiqué M. Lamy. Mais il y gagnera indirectement, en tant que contribuable.
Le système communautaire est impopulaire dans les pays membres comme l'Allemagne ou maintenant la Pologne, qui sont de gros consommateurs de banane. "Quand on passe d'un système contingentaire à un système tarifaire, le consommateur ne paye pas forcément moins cher, mais ce qu'il paye va dans le budget de l'Union au lieu d'aller dans la poche des titulaires de licences d'importation", a expliqué le commissaire. Il a qualifié de "très, très substantielle" cette rente aujourd'hui captée en grande partie par les multinationales, américaines ou européennes, qui dominent le commerce de la banane.
M. Lamy n'a pas précisé quel niveau de tarif l'UE envisageait d'appliquer sur les bananes produites dans la zone dollar. Mais dans une lettre confidentielle, adressée le 17 décembre 2003 à Pascal Lamy et à son collègue en charge de l'agriculture Franz Fischler, les ambassadeurs auprès de l'UE des principaux pays producteurs d'Amérique centrale, avaient demandé que le tarif ne dépasse pas 75 euros par tonne, a indiqué à l'AFP une source proche du dossier. Le prix de la tonne pour l'importateur varie dans une fourchette de 600 à 800 euros.
Les pays signataires étaient la Colombie, le Costa Rica, l'Equateur, le Guatemala, le Honduras, le Nicaragua et le Panama, selon la même source. |